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Mesure de dureté d’un matériau par nanoindentation

5 Août 2020

Pour compléter le parc d’équipements de mesure de dureté, le laboratoire Analyses et Surface du Groupe 6NAPSE a fait l’acquisition d’un nanoindenteur. Cet outil permet la caractérisation de dureté et de module de Young. L’analyse s’applique sur des épaisseurs très fines de types couches minces et des revêtements organiques.

Dureté des matériaux

La dureté d’un matériau représente sa capacité à résister à une pénétration ponctuelle et/ou locale, pour une force et/ou vitesse de charge connue. Les essais de duretés usuels sont réalisés par duromètres classiques (types Brinell, Vickers, Rockwell, Knoop, Shore…). Ils permettent de comparer la dureté des matériaux entre eux, à des échelles macro et microscopiques. Ces essais de dureté permettent l’analyse dans la masse sur des pièces de matières homogènes. Ils se limitent à une gamme de matière par machine : des alliages/composés durs (métalliques, céramiques…), des polymères (via la dureté Shore par exemple).

La nanoindentation répond aux limitations des duromètres classiques en « miniaturisant » la mesure. Les forces appliquées sont très faibles, permettant d’obtenir des zones d’analyses et des profondeurs de pénétrations réduites et très localisées.

La capacité de la technique à opérer sur des matériaux de types très différents favorise son application dans des domaines industriels variés : aéronautique, pharmaceutique, automobile, médicale …

Nanoindentation : technique de mesure de dureté

La nanoindentation permet la détermination de la dureté. Elle rend aussi possible l’accès à des caractéristiques mécaniques intrinsèques tel que le module de Young.

Les machines de nanoindentation peuvent accepter des pointes (indents), de formes multiples. Dans notre cas, la pointe exploitée est de type Berkovich (proche des pointes Vickers mais plus adaptée aux mesures à petites échelles). Il s’agit de pointes pyramidales à bases triangulaires. À noter qu’il est possible, par une formule mathématique de conversion, de remonter à une dureté Vickers. Les mesures ainsi réalisées sont très locales (interaction en profondeur sur la matière de quelques centaines de nanomètres à quelques dizaines de micromètres).

Couplée à un microscope optique, la nanoindentation permet la réalisation de mesures de dureté sur des grains dans un métal, des particules ou inclusions d’une centaine de micromètres, sans impact de l’environnement.

Cette technique est modulaire et opère de manière semi autonome. Elle peut réaliser de façon automatisée des matrices de duretés de plusieurs dizaines de points. Elle permet à la fois de moyenner l’ensemble des mesures et de déterminer une mesure de dureté à l’échelle macroscopique ou de mettre en évidence des zones locales de duretés différentes.

Les pointes Berkovich et la capacité de la machine à travailler suivant différents modes permettent de visualiser la réponse de la matière en profondeur. La machine enregistre la descente de la pointe. Il est possible de travailler sur des revêtements de surfaces de quelques micromètres et/ou des matériaux multicouches. La profondeur maximale d’accès de l’indenteur est de deux cent micromètres suivant la dureté des matières testées.

Mode de mesures de la nanoindentation et résultats associés

Le principe du nanoindenteur est de faire pénétrer une pointe dans la matière en fonction d’une charge maitrisée. La présence d’une bague de référence posée à même la surface de l’échantillon permet de connaitre la profondeur de pénétration. Un système optique permet la localisation des mesures sur des zones tels que des grains particuliers dans des métaux, des colorations de polymères à caractériser, ou des topographies de surface à éviter…

nanoindentation meure d'empreinte dureté matériau

Clichés Anton-Paar : schéma type d’une tête de nanoindenteur et de l’empreinte triangulaire laissée par une mesure.

La nanoindentation est une technique assez sensible pour détecter des modifications de duretés liées à des écrouissages de polissage. Il est donc préférable de réaliser l’analyse de revêtements ou couches minces depuis la surface de la pièce.

Mode 1 : mode standard

Le mode standard de la nanoindentation est proche d’une mesure de dureté Vickers classique. Pour une vitesse de charge et une force maximale donnée, l’indent pénètre dans la matière pour donner une empreinte triangulaire. La technique permet la lecture de la dureté Berkovich par observation de l’empreinte (à l’instar de la dureté classique) et également par interprétation mathématique des courbes de forces en fonction de la profondeur.

nanoindentation profondeur penetration

Données Analyses et Surface : À gauche la courbe d’asservissement de la force (en rouge) et le suivi de la pénétration en profondeur (en vert). À droite la force appliquée suivant la profondeur de pénétration (la dureté Berkovich est calculée en fonction de l’air de l’empreinte appliquée à la force maximale)

Mode 2 : mode sinus

Un second mode de mesure est particulier à la nanoindentation : un régime de charge et décharge sinusoïdale est appliqué lors de la pénétration dans la matière. Cette technique permet en une mesure de connaitre la dureté suivant toute la gamme de force balayée. Le module de Young peut être déduit grâce à ce mode de mesure.

nanoindentation mesure dureté matériau polymère plastique

Données Anton-Paar : courbe force-profondeur en mode sinus sur un matériau de type polymère

Mode 3 : matrice de dureté

Le nanoindenteur est programmable pour réaliser des matrices de mesures rendant possible l’analyse locale de différentes zones sur un échantillon. Cela permet de lisser la mesure de dureté pour des revêtements et se passer des contraintes locales.

matrice d'empreinte nanoindentation

Données Analyses et Surface : matrice d’empreintes suite à une campagne automatisée sur échantillon cuivré.

Exemple d’application : la caractérisation d’une poudre

L’analyse d’une poudre céramique avec des grains de faibles dimensions peut être complexe via une mesure de micro dureté Vickers (charges appliquées importantes, taille de la pointe non adaptée). Une étude de faisabilité de caractérisation via la nanoindentation a donc été réalisée.

Préparation spécifique + analyse instrumentée et automatisée

Les grains de la poudre ont été préparés de manière à être isolés et stabilisés via un enrobage dans une résine (avec peu, voire pas de retrait) suivi d’un polissage fin. À noter que le matériau ainsi caractérisé n’est pas sensible à l’écrouissage par le polissage.

Une première campagne de mesures en mode standard a permis d’optimiser les paramètres d’essai :

  • Grâce à une taille d’empreinte réduite, il est possible de réaliser jusqu’à 10 essais sur un grains de poudre tout en contrôlant l’impact de l’environnement du grain.
  • L’automatisation de la mesure permet également d’enchaîner la caractérisation sur différents grains de poudre et d’obtenir une valeur moyennée des propriétés.

Les courbes de forces par profondeur permettent de mettre en évidence les mesures « anormales ». Celles-ci sont générées par la fracture de la céramique aux angles de l’empreinte par exemple. Ce phénomène est néanmoins bien contrôlé par l’utilisation de très faible charge.

nanoindentation profondeur penetration

Données Analyses et Surface : à gauche, une courbe force en fonction de la profondeur conforme. À droite, une courbe similaire présentant un plateau confirmant l’apparition d’une rupture soudaine de l’échantillon (fissuration)

Les valeurs de duretés Berkovich, converties ensuite en Vickers, ont permis de valider les valeurs théoriques attendues.

Essais parallèles sur microduromètre Vickers

Une campagne réalisée en parallèle sur un microduromètre Vickers a mis en évidence que :

  • La nanoindentation a une dispersion des résultats plus réduite,
  • Les mesures dans cette configuration sont plus maîtrisées par nanoindentation : les cas de fissurations aux angles des empreintes sont minimisés, et leur impact peut même être visualisé sur les courbes d’essai.
  • Une seule mesure par grain est réalisable par microdureté Vickers.
  • Les empreintes et données brutes (courbes) issues de la mesure instrumentée permettent une exploitation plus précise et plus poussée des résultats.
  • Les valeurs de dureté obtenues en microdureté et par nanoindentation sont du même ordre de grandeur, et en accord avec les valeurs théoriques attendues. Des tests sur des grains de plus faibles dimensions sont donc envisagés.

 

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Contactez Analyses et Surface : analyses-surface@groupe-6napse.com