Transport de prélèvements biologiques par drone : étude de l’impact vibratoire et acoustique
Et si le futur de l’analyse de biologie médicale passait par les airs ? C’est ce qu’étudie le CHU de Rouen, en partenariat avec la métropole de Rouen, Normandie AeroEspace (NAE) et Delivrone. Le transport par drone de prélèvements de sang comporte notamment deux paramètres techniques à examiner : le risque de détérioration des échantillons lié aux vibrations du transport et la potentielle gêne acoustique pour la population. Le CEVAA, expert en vibro-acoustique du Groupe 6NAPSE, intervient dans ce cadre.
Transport de prélèvements médicaux en drone
L’hypothèse du transport des prélèvements biologiques par drone fait actuellement l’objet d’un grand intérêt dans le secteur de la biologie médicale et des hôpitaux. Le transport des prélèvements vers les plateaux techniques centralisés d’analyse est réalisé traditionnellement par voie routière et les contraintes de circulation, de délais et d’empreinte carbone amènent à envisager d’autres solutions, telles que les drones.
Par ailleurs, pour tout transport biologique, deux paramètres doivent être préservés : la température et la bonne conservation de l’échantillon prélevé.
C’est dans ce contexte que le CHU de Rouen, en partenariat avec la métropole de Rouen, Normandie AeroEspace (NAE) et Delivrone, ont étudié la faisabilité de mettre en place le transport des échantillons sanguins par drone, entre deux sites du CHU de Rouen.
Le drone robuste est surdimensionné afin de garantir la résistance face aux intempéries et la résistance liée au poids de la mallette d’échantillons. Ainsi, les dimensions de l’engin étudié sont d’environ 167cm de diamètre pour 73cm de hauteur. Il contient six batteries pour un poids de 10kg et peut atteindre une vitesse de 65km/h.
« Les échantillons biologiques dont le sang sont sensibles aux accélérations et vibrations. Ces phénomènes peuvent entrainer une hémolyse c’est-à-dire une destruction des globules rouges pouvant rendre l’échantillon impropre à l’analyse. La reproduction d’un modèle vibratoire en laboratoire est une approche innovante dans le domaine de la biologie permettant de s’assurer que les modalités logistiques sont adaptées aux exigences de qualité du biologiste médical. »
Afin de valider le projet, il est essentiel, d’une part, de mesurer si le transport en drone va provoquer une détérioration des prélèvements sanguins. D’autre part, il faut déterminer si le drone peut occasionner une potentielle gêne acoustique auprès de la population.
Le CEVAA, centre d’expertise en vibro-acoustique du Groupe 6NAPSE, a été mandaté par NAE, pour mener l’étude acoustique et vibratoire du transport par drone de la caisse contenant les échantillons.
Impact des vibrations du drone sur les échantillons de sang
« Dès lors qu’un système de transport est en fonctionnement, il génère des vibrations et du bruit qui peuvent occasionner de l’inconfort, une détérioration, une casse ou encore un changement dans les caractéristiques des matériaux. À partir de ce constat, il me parait nécessaire de tester la résistance des échantillons sanguins aux vibrations auxquelles ils sont soumis ».
Dans un premier temps, l’objectif était de savoir si les vibrations du drone pouvaient détériorer les échantillons sanguins lors des futurs transports.
Pour cela, des tests vibratoires ont été menés en extérieur. Des accéléromètres ont été placés sur le drone (sur la structure et dans la caisse de transport) afin de mesurer les vibrations au décollage, en vol et lors de l’atterrissage. Puis, différentes configurations de vol ont été reproduites : un premier vol de croisière avec une vitesse de 65km/h à 110m de hauteur, un deuxième vol très agité pour simuler une condition de tempête à différentes vitesses à 110m et enfin, une suite de cinq décollages/atterrissages plus ou moins brutaux.
Dès lors, la suite de l’étude consistait à reproduire les vibrations sévérisées sur vibrateur électrodynamique avec les échantillons sanguins placés dans la mallette puis analysés. Le CEVAA a ainsi reproduit ces conditions à l’extrême sur vibrateur.
Impact du bruit du drone auprès de la population
L’objectif, dans un deuxième temps, est de vérifier si le bruit du transport par drone d’un hôpital à un autre (de l’hôpital Saint Julien à l’hôpital Charles-Nicolle où est situé le plateau technique d’analyses biologiques) pourrait perturber la population dans la métropole. Il est donc nécessaire pour cela de réaliser des mesures acoustiques du drone dans un lieu où le bruit de fond est faible. De cette manière, le bruit généré est mesurable par le CEVAA avec précision.
Ensuite, il convient de comparer le niveau de bruit du drone au bruit ambiant de la ville (d’après la cartographie du bruit de la métropole de Rouen). En effet, le but est de sélectionner un trajet qui minimisera l’impact du niveau sonore sur la population pour un engin volant à 110m de hauteur.
Cartographie du bruit par la Métropole de Rouen (source)
« Pouvoir transporter plus rapidement et de façon plus propre les prélèvements biologiques et les médicaments répond à un enjeu de santé publique afin de permettre un traitement des patients adéquat et plus rapide dans les établissements de santé. Les drones médicaux sont une solution très efficace en réponse à cet enjeu. L’étude menée par le CEVAA et le CHU de Rouen était nécessaire pour nous assurer que le drone médical conservait correctement les prises de sang. Par ailleurs, comme toute révolution, elle doit s’inscrire dans le paysage public : mesurer par des experts qu’elle ne génère pas de nuisance sonore supplémentaire pour les populations était également primordiale. L’expertise du CEVAA a été déterminante pour nous sur ces deux aspects. »
Les résultats encourageants de cette étude scientifique seront présentés lors des Journées Francophones de Biologie Médicale (JFBM), à Antibes Juan-les-Pins, les 11-13 octobre 2023 par le Dr Valéry Brunel.
En savoir plus sur l’étude acoustique et vibratoire:
cevaa@groupe-6napse.com